La muraille d'Aurélien
(Photo : D. Lauvernier)
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La muraille construite par l'empereur Aurélien (270-275 ap. J-C) est commencée en 271 afin de protéger Rome des invasions barbares. Il s'agit de la première fortification construite à Rome depuis celle du IVème siècle avant J-C, dite de Servius Tullius, qui ne tarda pas à être englobée dans le tissu urbain au fil de l'expansion de la Ville.
Elle est entièrement construite en brique sur une longueur de 18,837 km et sa construction dura une dizaine d'années. Une première restauration est entreprise par Maxence mais la plus importante est celle réalisée par les empereurs Honorius et Arcadius à partir de 401 pour faire face aux Goths. Au VIème siècle, Bélisaire engage la réfection de la muraille lors des guerres gothiques. Du Moyen Age à nos jours, la muraille subit différentes dégradations.
Elle est encore largement reconnaissable aujourd'hui, même si les différents tronçons qui en subsistent témoignent de multiples restaurations.
Lorsque Aurélien arrive au pouvoir, il doit prendre des décisions concernant la défense de l'Italie. En particulier, il faut protéger les villes de Cisalpine et Rome contre les incursions des barbares. Ces derniers effectuent depuis longtemps des raids en profondeur à l'intérieur de l'empire. En 259-260, les Alamans envahissent le nord de l'Italie et Claude le Gothique doit les arrêter au lac de Garde. En 270, les Alamans et les Juthunges se livrent à de nouvelles incursions auxquelles Aurélien met fin non sans difficultés près de Pavie. C'est le moment où Aurélien décide de mettre un terme à la sécession palmyrienne mais il faut protéger Rome d'une éventuelle attaque surprise. Aussi décide-t-il de faire construire une muraille qui permettrait à la Ville de résister et d'attendre les secours face à des barbares peu équipés pour mener un siège.
La construction est réalisée simultanément par différentes équipes. La muraille repose sur des fondations en opus caementicium (mélange de graviers, de cailloux et de morceaux de briques formant un béton). On emploie la brique, l'opus latericium pour l'appareil des murs. Le mur mesure 6,5 m de haut pour 3,5 m de large. Il est couronné d'un muret de 1 m de haut surmonté de merlons mesurant 60 cm et espacés de 3 m.

Croquis de la muraille à l'époque de l'empereur Aurélien
Une tour carrée est placée tous les 30 m et déborde de la muraille de 3,50 m. Les tours de l'époque aurélienne possèdent 4 grandes fenêtres, 2 sur la face avant et une de chaque coté. Ces fenêtres ouvrent sur une chambre de tir. Il existe trois types de portes permettant d'entrer dans la Ville. Le premier type concerne les portes majeures. Il consiste en une double arche encadrée par deux tours semi-circulaires. Entre celles-ci, le chemin de ronde est remplacé par une galerie couverte et percée de fenêtres. Un parement de travertin recouvre la porte. Le deuxième type présente les mêmes caractéristiques mais avec une seule arche. Le troisième ne comprend qu'une arche sans tours de flanquement ni revêtement de travertin. Toutes ces portes sont fermées de l'extérieur par une porte à double battant et à l'intérieur, par une herse.

Croquis de la muraille à l'époque des empereurs Honorius et Arcadius
Une première restauration intervient à l'époque de Maxence. Selon le Chronographe de 354, il entreprit la construction d'un fossé au pied de la muraille mais il ne put l'achever. Il semble aussi qu'il entreprit la modification de la muraille en elle-même. Par endroits, on peut voir, entre la phase d'Aurélien et la phase d'Honorius, un travail effectué en blocs de tuf et en briques. La modification concerne sans doute le parapet et les merlons. Ces derniers deviennent alors plus grands : 90 cm de haut pour 75 cm de large. Leur espacement se réduit également puisqu'il varie entre 75 cm et 1,5 m au lieu de 3 m.
La seconde restauration, en fait une véritable refonte, date des années 401-402 à l'instigation du maître de la milice Stilicon. Elle vise à adapter la muraille aux nouvelles exigences tactiques d'une époque troublée par les incursions des Wisigoths menés par Alaric. La première étape des travaux consiste à déblayer la couche de gravats qui s'était accumulée au pied de la muraille en un siècle ( Voir Corpus Inscriptionum Latinarum VI, 1188 ). Ensuite, on surélève le mur d'enceinte et les tours qui mesurent désormais près du double de la hauteur originelle. Un chemin de ronde couvert est construit sur le rempart d'Aurélien. Il est ouvert vers l'intérieur de la ville, la voûte étant soutenue par un système d'arcades. Des meurtrières sont percées dans cette nouvelle partie. Les tours possèdent une deuxième chambre de tir et sont couvertes par un toit de tuile. Les portes à double arche sont réduites à une seule. On aménage également des contre-portes fortifiées faisant de chaque entrée un fortin autonome. C'est à cette époque que le mausolée d'Hadrien est incorporé dans le parcours de la muraille. Paul Bigot a représenté cet état de la muraille sur sa maquette. Ces travaux n'empêchent pourtant pas la prise et le sac de Rome en 410 par les troupes d'Alaric qui entrent par la porta Salaria. En 440, les empereurs Théodose II et Valentinien III ordonnent la restauration de la muraille. La ville est de nouveau prise en 455 par les Vandales de Genséric puis en 472.
Théodoric, roi des Ostrogoths qui a formé un royaume en Italie depuis 493, entreprend une autre restauration au début du VIème siècle. Au cours des guerres gothiques du milieu du siècle, la muraille subit de nombreux dégâts et des restaurations. Dans le De Bello Gothico, Procope de Césarée fait de nombreuses allusions au siège de Rome et à la muraille. Bélisaire remet en état la muraille en 536. Les merlons sont modifiés, un fossé creusé pour empêcher les machines de guerre d'approcher trop près les murailles. La zone comprise entre la porta Flaminia et la porta Prenestina est renforcée. Mais, en 546, les Goths de Totila prennent la ville et détruisent certains tronçons de la muraille. Totila s'empare de nouveau de la ville en 549 et ce n'est qu'en 552 que Narsès, successeur de Bélisaire, chasse les Goths définitivement de Rome et d'Italie. Il entreprend une ultime restauration de la muraille pour cette période.