La vis d’Archimède ainsi nommée du nom de son inventeur présumé est une machine qui permet d’élever une grande quantité d’eau, mais à une faible hauteur. La vis se compose d’un cylindre placé obliquement, à l’intérieur duquel sont enfermées plusieurs spirales. Lorsque le cylindre tourne, l’eau monte d’une spirale à l’autre jusqu’à l’extrémité supérieure. L’inclinaison du cylindre préconisée par Vitruve selon les règles du triangle de Pythagore est de 37°. Des échelons en bois étaient fixés sur la vis pour qu’elle soit actionnée par un homme marchant dessus. Comme on le voit sur une peinture de Pompéi et sur une terre cuite d’Egypte, il faut supposer l’installation d’une barre horizontale pour que l’opérateur puisse se tenir.
Les témoignages littéraires, papyrologiques et archéologiques attestent son usage dans le mondé méditerranéen du IIIe siècle avant J.-C. au du IIIe siècle après J.-C. au moins. Après cette époque, elle reste utilisée en Afrique sous les Arabes, mais on perd sa trace en Europe jusqu’à sa réapparition au début du XVe siècle.
Vitruve décrit la façon de construire cette vis :
La construction de la vis est sophistiquée : elle exige un calcul précis du pas de vis, de l'inclinaison totale de l'ensemble et une réalisation soignée des huit canaux. On peut se demander du reste pourquoi Vitruve fait un si grand nombre de canaux. A la limite un seul suffirait : c'est la solution choisie sur plusieurs vis découvertes en Espagne (Cf. G.F. Hill et H.W. Sandars, « Coins from the neighbourhood of a Roman mine in southern Spain », JRS, 1, 1911, p. 100. L'unique spirale sur ces vis est faite en cuivre et non en osier ou en gattilier, mais cela ne change pas le problème) et celle découverte à la Coronada n'en possédait que quatre. A. G. Drachmann rapproche ce chiffre "huit" des huit compartiments du tympan, considérant que la vis est un perfectionnement de cette machine par Archimède : pendant un séjour en Égypte, le Syracusain, voyant partout des tympans et se souvenant de ses études sur la vis et la spirale, aurait eu l'idée d'utiliser une vis pour élever l'eau. "Alors, comme il arrive souvent, il a juste modifié un instrument existant et n'est pas arrivé tout de suite au dessin définitif avec une seule spirale (A.G. Drachmann, The mechanical technology of greek and roman Antiquity. A study of the literary sources (Acta hist. scient. nat. et med., 17), Copenhague, Munksgaard, 1963, p. 154). A vrai dire le chiffre huit n'est pas obligatoire non plus dans le cas du tympan, mais, comme il s'agit de partager une circonférence en compartiments égaux, les séparations en quatre et en huit sont commodes et il est probable en effet que lorsqu'on est passé des roues à la vis, on a maintenu cette multiplication des compartiments sans se rendre compte tout de suite qu'elle n'était pas nécessaire. La spirale unique est un perfectionnement (et pas seulement une simplification) en ce sens qu'elle permet un pas plus serré et donc une inclinaison plus grande de la machine. Ce perfectionnement est sûrement lié à l'utilisation du cuivre qui se prête mieux à une courbure plus serrée que les baguettes de bois et il est peut-être dû aux ingénieurs des mines de cuivre espagnoles. La vis a connu également d'autres perfectionnements, notamment dans ce que l'on appelle parfois la "vis hollandaise" : la spirale n'est pas recouverte de planches de bois comme celle de Vitruve, mais elle tourne dans un demi-cylindre fixe placé sous elle. Il y a bien sûr une perte d'eau à la jointure entre la spirale et le demi-cylindre, mais la machine est beaucoup plus facile à tourner puisqu'elle est allégée du poids des planches de couverture.
D’après Vitruve le rapport entre le diamètre du cylindre central (autour duquel sont fixées les spires) et la longueur totale de la vis est de 1 à 16 puisque « l’on donne à cette pièce (le cylindre central) autant de doigts d’épaisseur que de pieds de longueur ». Or ces mesures sont confirmées par les vis découvertes à Sotiel Coronada où le diamètre du noyau central est égal à 22 cm pour une longueur totale de 3,60 m, soit un rapport de 1/16,36 environ.
L'inclinaison préconisée par Vitruve selon les règles du triangle de Pythagore est d'environ 37°. Cet angle doit être obligatoirement moindre que celui de la tangente à l'hélice avec la base du cylindre qui est de 45° d'après la construction indiquée précédemment par Vitruve (A. Terquem, La science romaine à l'époque d'Auguste. Étude historique d'après Vitruve, Paris, Alcan, 1885, p. 85). Dans les faits l’inclinaison était adaptée aux besoins (plus elle était forte, moins le débit était important), mais aucune installation actuellement retrouvée ne montre un angle supérieur à 37°. Dans la mine de Sotiel Coronada l’inclinaison est de 15°, dans celle de Centenillo (Linares), elle est de 30° (mais l’angle de l’hélice lui-même n’est que de 40°).
Vitruve indique le même mode de propulsion pour cette machine que pour les roues (Les indications - curieusement concordantes - de Rich (s.u. coclea 3) et de Dar.-Sag. (I, 2 p. 1265 s.u. coclea 4) selon lesquelles ces cylindres étaient mûs par un cheval ou une roue à bras, sont, à notre connaissance, sans fondements) : cocleae hominibus calcantibus faciunt uersationes, « Les vis tournent grâce au mouvement des pieds ». L'inclinaison de l'ensemble a gêné certains commentateurs qui supposent un système de tambour assez compliqué pour permettre aux hommes de marcher sur un plan horizontal (L'architecture, éd. et trad. par C. Maufras, Paris, Panckoucke, 1847, fig. 11 p. 84); C'est oublier que cette inclinaison n'est pas si forte puisque c'est celle préconisée par Vitruve au livre IX pour la construction des escaliers (Vitr. 9, praef. 7 : "cette méthode (le triangle de Pythagore), souvent utile pour bien des mesures, est commode également pour la construction des escaliers dans les bâtiments : elle permet de donner aux marches des dispositions convenables". Sur le triangle de Pythagore chez Vitruve, voir J. Soubiran, Vitruve, Livre IX, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1969, comment. ad loc. p. 48-51). Elle ne peut pas gêner la manoeuvre d'échelons comme sur les roues. Du reste la peinture de Pompéi et la terre cuite d'Égypte (La peinture de Pompéi est à interpréter avec beaucoup de réserves car son auteur n'avait manifestement pas un grand souci d'exactitude : l'engin est représenté horizontal au lieu d'être oblique, le filet d'eau sort du centre au lieu de sortir du bord, etc) qui représentent un homme manoeuvrant une vis, le montrent debout directement sur la vis. Sur la terre cuite d'Égypte on remarque simplement des degrés pratiqués sur la circonférence du cylindre. En revanche on distingue, sur ces représentations, une barre horizontale à laquelle se tient l'opérateur. Il faut supposer l'existence de cette barre dans tous les systèmes précédents, malgré le silence de Vitruve sur ce point.