Roue à augets
La roue à augets est la traditionnelle noria encore utilisée aujourd’hui dans certains pays.
Elle peut élever l’eau à une hauteur sensiblement égale aux trois quarts de son diamètre ; les roues romaines trouvées dans les mines de Tharsis (Espagne), par exemple, avaient un diamètre de 4,28 m et elles élevaient l’eau à une hauteur de 3,20 m. Avec la Chaîne à godets , la hauteur d’élévation de l’eau n’est limitée que par la longueur de la chaîne et la force motrice dont on dispose : avec suffisamment de puissance, il n’est pas exclu de pouvoir élever l’eau jusqu’à une dizaine de mètres.
Des restes de roues à augets romaines ont été mis au jour dans des mines à Dolaucothi (Grande Bretagne), Rio Tinto (Espagne), Sao Domingos (Portugal), Tarsis (Espagne), Ruda Verespatak (Yougoslavie). On a retrouvé des vestiges d’installations pour alimenter des bains à Ostie.
La roue à augets (d’après Fleury, La mécanique de Vitruve, Caen, Presses Universitaires de Caen, 1993, fig. 31 p. 155).
A : rota ; B : axis ; C : modiolus ; D : castellum ; E : canalis
L’avantage de la roue sur le Tympan est qu’on utilise le diamètre et non le rayon pour élever l’eau. Par contre on ne peut profiter de toute la surface du cercle pour fabriquer les récipients qui doivent être fixés sur la circonférence. Ces récipients ont la forme d’augets carrés (modioli quadrati) d’après Vitruve, et ils sont assemblés avec un mélange de poix et de cire, signalé également par Pline sous le nom de zopissa (Pline, Nat. 16, 56 : “Il ne faut pas omettre que ces mêmes auteurs appellent zopissa un mélange de poix raclée sur les navires de mer et de cire, car il n’est rien que les hommes n’aient essayé ; elle est beaucoup plus efficace pour tous les usages où l’on emploie les poix et les résines, sans doute à cause de la dureté donnée par le sel. Cf. Dioscoride, 1, 72, 3). Les roues romaines actuellement retrouvées et sur lesquelles on a pu reconstituer le système de recueillement de l’eau offrent des variantes par rapport à la description de Vitruve. Celle de Dolaucothi (Grande Bretagne), surtout, présente, si la reconstitution est exacte (En fait un seul fragment a été retrouvé, mais sa forme est suffisamment précise pour justifier la reconstitution de G.C. Boon et C. Williams, The Dolaucothi drainage wheel, JRS, 56, 1966, p. 122-127), un système intéressant avec des compartiments utilisant toute la circonférence. Les roues de S. Domingos (Portugal) offrent encore un autre système avec des augets placés sur le bord extérieur de la circonférence et non sur le côté (circum extremum latus) comme le recommande Vitruve.
Le mode de propulsion de la roue à augets est la calcatura. Cela est confirmé par la présence d’échelons ou de marches sur les roues romaines conservées dans les mines. R.E. Palmer a calculé qu’une roue à augets d’environ 4,65 m de diamètre avec trente compartiments, tournant à une vitesse périphérique d’un peu plus de 9 m à la minute, élevait quatorze compartiments à la minute, soit, en tenant compte des pertes, environ 84,30 litres à une hauteur de 3,65 m (R.E. Palmer, Trans. Inst. Mining and Metallurgy, 36, 1926-1927, p. 302-304).
Vitrue, De architectura, 10, 4, 3 :
Cum autem altius extollendum erit, eadem ratio commutabitur sic. Rota fiet circum axem ea magnitudine ut ad altitudinem quae opus fuerit conuenire possit. Circum extremum latus rotae figentur modioli quadrati pice et cera solidati. Ita cum rota a calcantibus uersabitur, modioli pleni ad summum elati rursus ad imum reuertentes infundent in castellum ipsi per se quod extulerint.
Quand il faudra cependant élever l’eau à une plus grande hauteur, on aménagera le même système de la manière suivante : on mettra autour de l’essieu (B) une roue (A) dont le diamètre sera proportionné à la hauteur nécessaire. En bordure, à la circonférence de la roue, on fixera des augets carrés (C), calfatés avec de la poix et de la cire. Ainsi, quand la roue tournera sous l’action des pieds, les augets pleins, portés jusqu’au haut, puis revenant à nouveau vers le bas, déverseront d’eux mêmes, directement, dans le réservoir (D) toute l’eau qu’ils auront élevée (Traduction Ph. Fleury, La mécanique de Vitruve, Caen, Presses Universitaires de Caen, 1993).